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Femmes dirigeantes et membres du conseil : un frein à l’évasion fiscale ? Une tribune de Faten Lakhal enseignante-chercheuse à l’EMLV

La présence de femmes au sein des conseils d’administration ou comme directrice financière influence les pratiques en matière fiscale. Plus de femmes, c’est moins de fraudes.

La France fait partie des rares pays à avoir adopté un arsenal législatif imposant un quota de femmes dans les conseils d’administration et les équipes de direction. Concrètement, la loi Copé-Zimmermann de 2011 stipule que les sociétés cotées en bourse et celles ayant plus de 500 salariés et un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros doivent porter le nombre de femmes dans leur conseil d’administration à 20 % d’ici 2014 et 40 % d’ici le 1er janvier 2017.

Plus récemment, la loi Rixain adoptée en 2021 impose d’inclure des femmes aux postes de direction des grandes entreprises qui comptent au moins un millier de salariés. La proportion de femmes cadres devra atteindre au moins 30 % d’ici 2026 et 40 % d’ici 2029.

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Le risque de l’évasion fiscale

Dans notre étude, nous examinons l’impact de la présence de femmes au sein des conseils d’administration et aux postes de direction dans l’entreprise – que ce soit en tant que dirigeante de l’entreprise ou directrice financière – sur les pratiques d’évasion fiscale des sociétés françaises cotées en bourse. Celle-ci est calculée comme la différence entre l’impôt théorique et l’impôt courant payé par les sociétés. Nous y explorons également l’impact de l’adoption de la loi Copé-Zimmerman sur cette relation.

L’évasion fiscale est définie comme la réduction des impôts explicites. Cela couvre un large spectre de pratiques fiscales, allant de la planification fiscale à la fraude fiscale en passant par la gestion ou l’agressivité fiscale. En France, le montant total des impôts non payés a été estimé aux alentours de 80 milliards d’euros par an. De côté des entreprises, les entreprises qui pratiquent l’évasion fiscale prennent un risque considérable de payer de lourdes pénalités et un risque de nuire à leur réputation.

Par rapport aux hommes, les femmes sont réputées avoir des attitudes différentes à l’égard des codes d’éthique et utilisent des règles de décision différentes concernant les évaluations éthiques. En conséquence, il est possible de poser l’hypothèse qu’un leadership éthique des femmes directrices contribuerait à des pratiques plus éthiques et à un meilleur suivi des actions managériales.

Gestion éthique

En utilisant un échantillon de 171 entreprises françaises cotées sur la période d’allant de 2007 à 2017, nos résultats révèlent que la nomination de femmes aux postes de haute direction a contribué à réduire les pratiques d’évasion fiscale des entreprises, particulièrement, les femmes occupant le poste de directeur financier. Ces résultats confirment l’hypothèse selon laquelle les femmes dirigeantes auraient un style de gestion éthique et une plus grande aversion au risque.

De plus, nos résultats montrent que l’évasion fiscale est associée négativement à la présence de femmes au sein du conseil d’administration, ce qui suggère que les femmes remplissent efficacement leur rôle de contrôle dans ce cadre. Cependant, cet effet est plus important préalablement à l’introduction d’un quota obligatoire de femmes administratrices par la loi Copé-Zimmermann.

Cela laisse penser que les entreprises qui ont rapidement intégré des femmes au conseil d’administration pour se conformer à cette loi n’ont peut-être pas atteint une composition optimale et performante de leur conseil.

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Une particularité française ?

Les résultats de notre étude enrichissent la littérature portant sur la diversité de genre et l’évasion fiscale en analysant l’impact de la présence des femmes au sein des conseils d’administration (rôle de surveillance) et aux postes de direction (rôle décisionnel) sur les pratiques d’évasion fiscale des entreprises.

Ce comportement peut varier, car si les femmes peuvent être efficaces dans leur rôle de contrôle, elles tendent à adopter une approche plus conservatrice que leurs homologues masculins en matière de prise de décisions. Par la suite, notre étude se concentre sur le cas de la France, un pays qui s’illustre par sa lutte active contre l’évasion fiscale et son engagement en faveur de la présence des femmes dans les conseils d’administration.

Notre recherche apporte ainsi de nouvelles preuves de l’impact de la diversité de genre dans les conseils d’administration sur les pratiques d’évasion fiscale, dans un contexte où des quotas sont imposés.

Plus de femmes

Nos résultats ont plusieurs implications pour les conseils d’administration, les régulateurs et les investisseurs. Les conseils d’administration peuvent continuer à renouveler leur composition pour inclure des femmes administratrices possédant l’expertise adéquate afin de parvenir à une structure efficace.

Lors de la nomination des dirigeants et des directeurs financiers, les conseils d’administration devraient non seulement tenir compte des qualifications et de l’expérience, mais également évaluer les caractéristiques individuelles telles que le sexe, l’attachement aux codes éthiques et la propension à prendre des risques.

Les régulateurs devraient encourager les entreprises à recruter davantage de femmes compétentes aux postes de direction en plus du conseil d’administration. Enfin, les investisseurs peuvent être encouragés à prêter davantage attention à la présence de femmes dans les postes de direction et dans les conseils d’administration lorsqu’ils investissent dans les entreprises.

Pour en savoir plus sur les programmes de l’EMLV 

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