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Léonard de Vinci: la pluridisciplinarité et le goût de l’inachevé

Apprendre de Léonard – Partie 5. 500 ans après la mort de Léonard de Vinci, les écoles du Pôle Léonard de Vinci reviennent sur les traces du génie pluridisciplinaire dont l’influence est encore ressentie aujourd’hui. Suite de la série « Apprendre de Léonard » avec Michel Dalmas, enseignant-chercheur à l’EMLV.

Nous n’avons de cesse de rappeler que ce qui compte, c’est de suivre un parcours professionnel qui permette de certifier que nous avons acquis de réelles compétences, parfois difficiles à cerner mais indispensables à qualifier afin de convaincre un employeur potentiel. Cette attente est totalement légitime, pour autant, ne nous empêche-t-elle pas d’accéder au génie dont on cherche aujourd’hui à dessiner les contours, cinq siècles la mort d’un des plus grands peintre, architecte, anatomiste, sculpteur, musicien, cartographe et inventeur de tous les temps ? Il est bien sûr question de Léonard de Vinci.

L’inachevé comme philosophie de vie et symbole du perfectionnement

En quoi la pluridisciplinarité est-elle le ferment du génie humain ? Répondre à cette question aurait sans doute plu à Léonard de Vinci, mais, en son absence, il est possible malgré tout d’observer certaines de ses œuvres pour y déceler des transpositions, des analogies qui démontrent les passages entre des univers différents et son sens inné de la pluridisciplinarité

Si l’on évoque ses peintures à l’huile, il est intéressant de noter d’abord que cette collection n’est pas pléthorique. Le nombre total de tableaux qui lui sont attribués est de 24. Pour Léonard de Vinci, une œuvre semble toujours inachevée. Ce dernier ne signe jamais ses œuvres… Comment interpréter ce renoncement? Peut-être, tout d’abord,parce que son œuvre est collaborative et que signer celle-ci en solo n’est pas possible pour quelqu’un qui reconnaît l’importance du travail des autres.

Cette attitude d’honnêteté aurait pour miroir sa conception de la perfection qui ne peut probablement jamais se concevoir comme un aboutissement mais comme un cheminement. Ses œuvres ne sont donc jamais terminées et cette porte ouverte à l’amélioration continue provient certainement d’une idée de la perfection et du sens du détail, exacerbés. Peut-être que son dilemme fut le suivant : comment pourrais-je signer une œuvre et donc la terminer, alors que je découvre sans cesse de nouvelles perspectives artistiques, et que je pourrais rendre le résultat différent ?

Jouer avec les techniques et les disciplines, l’innovation précoce

Ainsi, parmi ses œuvres, les historiens de l’art lui attribuent la technique de l’ombré que certains de ses contemporains, tel Botticelli,n’utilisait pas. Pour quelle raison ? D’abord parce que sa connaissance de l’anatomie lui permettait de créer un effet de relief plus réaliste, mais également parce qu cet estompage adoucissait les contours, créant ainsi un effet de relief. Une autre technique fut son sens inédit de l’espace, quasiment inédit à son époque. Les objets éloignés en arrière-plan étaient volontairement vaporeux, créant ainsi une impression de distance et donc de profondeur. Son sens du détail ne s’appliquait donc pas pour le second plan car traiter de manière identique le premier et le second plan ne correspondait pas à la manière dont le cerveau analyse de fait la réalité. Enfin, il utilisait ses connaissances architecturales pour le trompe-l’œil (la Cène, 1495-1498) et ainsi multipliait les points de vue mais également la perspective, pour attirer le regard vers un unique point de fuite (cf. « la Cène », avec le personnage de Jésus).

Dernièrement, il inaugura un nouveau réalisme en introduisant dans ses toiles des animaux, qui, très naturellement apportaient une dimension plus humaine à ses compositions, comme « la dame à l’hermine » toile peinte vers 1490.

Le travail collaboratif, comme source de toutes les créations

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Il serait bien sûr possible de continuer à évoquer ces passages interdisciplinaires chez Léonard de Vinci, d’un domaine à un autre, pour l’ensemble de son œuvre.

In fine, c’est peut-être cela que nous pourrions retenir d’essentiel, dans sa démarche. De nos jours, comment donc, en suivant sa démarche méthodologique, devenir un réel inventeur, comment innover en observant toujours et encore la nature, c’est à dire notre environnement, si ce n’est en créant des relations, en utilisant des analogies, pour proposer des solutions inédites ?

Ainsi, si nous nous mettions à créer des stromatolites à rendement accéléré pour abaisser les taux de CO2 dans l’atmosphère et ainsi rendre notre planète un peu plus respirable ? Voici donc un challenge que Léonard de Vinci n’aurait probablement pas pris à la légère et que des étudiants de l’ESILV, de l’IIM et de l’EMLV pourraient relever, travaillant ensemble avec des approches différentes, mais à la manière de Léonard de Vinci.

Le génie, selon l’héritage de cet homme n’est pas étriqué autour d’une seule personne, il est certainement surtout collaboratif. Peut-être est-ce cela le message fondamental de Léonard, qui ne signait jamais ses tableaux… ?

Michel Dalmas, enseignant-chercheur responsable de la filière Digital RH à l’EMLV

Crédit illustration : Léa Amati

This post was last modified on 02/10/2019 18:08

Categories: L'école
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